Dans la lumière des saisons – Charles Juliet
J’ai passé ma journée à marcher sur les collines. Des écharpes de brume traînaient dans la plaine, mais sur les hauteurs, une lumière dorée exaltait les ocres, les bruns, les rouges des vignes et des arbres qui brûlaient dans l’air immobile.
Si vous saviez combien j’aime l’automne, combien je me sens accordé à cette saison. Les ardeurs de l’été ont pris fin, et avec elles, les tensions, parfois le mal-être qu’elles entraînent. Une douceur est là, présente dans l’air, les lumières, les ciels qui pâlissent. En elle se profile la menace du déclin, et c’est peut-être cette menace qi donne tant de prix à la splendeur de ces journées où la vie jette ses derniers feux.
Saison des fruits, des récoltes, de la surabondance. Maturité. J’ai toujours associé cette saison à ce que représente pour moi la femme, la mère, à ce qui opère en la majorité d’entre vous et dont l’homme est si loin.
De cet automne je passe à celui de l’existence humaine. Pour nous aussi au long des années, se succèdent des nuits de gel, des vents dévastateurs, d’implacables journées de canicule, des orages, des sécheresses, des pluies torrentielles, et c’est tout cela qui finit par produire la richesse d’une vie, la beauté d’un visage. (Un visage n’est jamais si beau, si émouvant, qu’à son automne.) Sachons donc tout recevoir d’un cœur égal et conduire nos vies vers cette plénitude du fruit qui s’est fortifié de tout ce qui lui fut contraire.